Blue as the sky. Mais pas aujourd'hui. Ce matin le ciel est rose. Ce n'est pas mal non plus. Blue aurait bien aimé avoir les cheveux roses, cela lui aurait changé la vie.. elle se serait appelée Rosa, sans aucun doute. La jeune femme pouffe de rire, croisant les bras derrière son dos, le menton haut, la tête renversée en arrière alors qu'elle regarde le rose se faire la malle. Inévitablement, le ciel redeviendrait bleu. Après le rose, après le noir, après l'orage et la pluie, qu'importe la neige, les saisons, il retournerait toujours au bleu. Il y avait sans doute une leçon à retenir. Un proverbe à trouver sur l'immuable. Mais, tout ce que vint à Blue, se fut un sourire. Lui aussi, reviendrait toujours.

C'est la surface dure et rude de la réalité qui la rappela au présent. Un mur. Qui s'était placé juste sur son chemin pour lui donner une pichenette au menton. La bleue grogne en se frottant le menton avant de tourner un regard à gauche et à droite, histoire de savoir s'il y avait des témoins.. Le marché était déjà agité, on avait sans doute du l'éviter sur son chemin vers le mur mais, elle ne repérait personne qui s'intéressait à elle.. ou au mur. Elle le tapote du plat de la main comme on s'excuserait auprès d'un bon pote. Et fait demi-tour. Forcément.

C'est à ce moment qu'elle le vit. Bloqué là, à regarder un stand de pâtisseries comme si le ciel allait lui tomber sur la tête. Si grand et pourtant écrasé par la gravité de ses traits. Il avait un joli visage, des cheveux noirs comme le charbon et des yeux.. bleus. Tiens. C'est rigolo. Il ressemble à un de ces ours qu'on décrit dans les histoires, bourru, pataud à la sortie de l'hiver. Celui là, on ne savait pas bien s'il était à la recherche d'une bagarre ou d'un bon pain. Tiens, les deux pouvaient être synonymes. Et la voilà qui rit toute seule en fixant le pauvre garçon sans doute venu s'acheter ses croissants du matin. Elle rit et ne voit que trop tard le portail qui se dessine au-dessus de sa tête. Elle lève les yeux alors que les cercles sont déjà tracés, le destin scellé.

- Oh sh..

Quatre pattes dépassent à présent du portail, des grosses pattes qui appartiennent peut-être bien à un représentant de la famille des ursidés. La bleue se met à courir, elle peut être rapide quand elle veut, l'habitude hélas. Elle essaie de s'éloigner des stands, trébuche en tentant d'éviter une famille, tourne au coin de la rue, tombe sur une bande de gamins qui jouent avec un ballon, fait demi-tour, trop tard. Le bruit sourd d'un poids largué du ciel arrête Blue dans son élan, le portail à disparu au-dessus de sa tête. Au moins il avait été assez aimable pour la suivre dans sa course. Un grognement dans son dos, la jeune femme se retourne lentement pour faire face à la Bête. Elle sait qu'il y a des enfants pas loin et tout le reste du marché à deux pas, elle doit faire face. Blue se prépare à un combat féroce, tend ses muscles, se rappelle les enseignements de maître Shi Fu le fameux, celui dont parle les livres, en tout cas ceux de l'orphelinat, elle prend une lente inspiration et se retourne.

Il se tient là, fourrure sombre et pattes griffues, désorienté, il montre ses crocs acérés à la face de sa piètre invocatrice..

- Oh tu es.. un glouton ?

L'animal, peu impressionné par le machin bleu qui semble le regarder de haut, s'ébouriffe. Mince, il est peut-être vexé finalement.