outfit (by metadeer) | theme | @Malenia S. Ithil

Tous finissaient par périr. Les autres gens, de l'Académie. Sa famille, aussi. Imriel, envolé depuis presque deux siècles maintenant. Pourtant, certains visages ne s'étaient jamais étiolés sous les affres du temps. Statues ornant, ponctuellement, les couloirs sinueux de l'Académie. Adrielle était l'une de ces œuvres d'art, aux oreilles pointues. Mais elle n'était pas la seule en ces lieux à être affligée par cette éternité. D'autres elfes s'échouaient aussi par ici. La plupart sans importance. Être immortel n'était pas un gage d'excellence. Et seule la superbe des gens savait attirer le regard de la forgemage. Au milieu de la foule se cachait une gemme. Rubis étincelant. La pierre de feu. Celle qui représentait, si parfaitement, Malenia. Digne d'intérêt. Plus que ça, digne d'amour, de respect. Elle la connaissait, bien, depuis la nuit des temps. A l'heure du coucher, quand sa mère lui racontait les incroyables aventures de Feu et Glace, sur le champ de bataille. Et puis une vraie rencontre, quand elle était venue affronter ses démons, là dans les terres sombres. Une présence rassurante, réconfortante. Comme une autre mère, même si aucun mot n'aurait su exprimer ce qu'elle représentait. Pour tous. Ennemis comme alliés, sans distinction. Une personne d'importance, qu'elle avait déçu.

Si Adrielle était un vieux meuble, au milieu de l'Académie, Malenia en était les fondations. Roc solide, présent depuis le début. Jeu dangereux, à l'éviter tout ce temps. La demoiselle avait honte. Ne se sentait pas capable de soutenir son regard inquisiteur, et ses remarques cinglantes. Aujourd'hui, elle regrettait de s'être si lâchement enfuie du front. En capacité de faire la différence, contre ces monstres. A la place, elle s'était noyée dans un océan de superficialité. Le retour à la réalité n'en avait été que plus brutal. Une violence nécessaire, pour redonner un sens à sa vie. La fuite restait, cependant, une solution temporaire. Et rappelait, toujours, son opprobre. La magicienne le savait, elle finirait un siècle ou l'autre par la confronter, de son plein gré ou non. Hors de question de ne pas être préparée à une telle éventualité. Adrielle n'était plus l'enfant fragile, bête et craintive de cette ère révolue. Assurée de ses choix, consciente de ses erreurs. Alors pourquoi cet étrange besoin de se justifier ? Même elle n'en avait pas la réponse. Qu'importe. Il était temps de prendre les devants. Alors ses doigts s'étaient attelés à créer une merveille. Fruit de longues années de travail, plus par manque de temps qu'autre chose. La lame était simple, mais tranchante. Se ferait l'appendice de ses pouvoirs. Mère d'incendie. Le cadeau idéal, pour recommencer à zéro. Si elle l'acceptait.

Et le jour tant attendu était arrivé, enfin. Les retrouvailles. La matriarche s'était vêtue aux couleurs de ce que lui évoquait sa vieille amie. Noir, pour les cendres qu'elle laissait dans son sillage. Rouge, pour les flammes, pour cette passion ardente qui régnait en son cœur. Robe bouffante, ravissante, sans aucune praticité. Adrielle était habituée, à se montrer si vaine. Finissait par surprendre, de son agilité, même perchée sur des talons hauts, ou saucissonner dans la plus improbable des étoffes. Incertaine, elle s'était élancée dans les jardins de l'Académie. Là où la lionne venait se ressourcer, loin de la tempête. Autrement libre pour la journée, si elle devait la pourchasser à travers la cité toute entière, alors c'est ce qu'elle ferait. Sans pitié. Sans honte, surtout. Aubaine, que d'apercevoir au loin cette rivière immaculée, déployée tout du long d'un banc. Chevelure reconnaissable, en un coup d’œil. Le fourreau fermement agrippé entre ses griffes finement limées, Adrielle se décida à envahir, après un instant d'hésitation, l'espace personnel de la si célèbre guerrière. - Dame Ithil. Vous êtes éveillée ? Si elle était là pour se faire pardonner de ses exactions passées, elle assumait ses frasques actuelles.

Qu'importe, si elle la réveillait ou non. Le plus important était autre part. Bien plus loin.